Introduction :
La grande illusion.
On nous a trop longtemps répété que l’économie obéissait à des lois naturelles, aussi évidentes que la gravité ou la course des astres. Que l’offre et la demande se rencontraient comme l’eau trouve toujours la pente. Que les marchés, laissés à eux-mêmes, produisaient équilibre, prospérité et justice. Mais cette fable n’est pas la vérité : c’est un récit, une croyance sacralisée au service de l’ordre établi. Car les marchés n’ont jamais jailli de la nature : ils sont tissés de conventions humaines, d’accords tacites, de règles juridiques, de rapports de force.
Derrière la prétendue naturalité se cache l’artifice. Et pourtant, si l’on écarte ce voile, une autre question surgit : quelles seraient, alors, les véritables lois naturelles de l’économie, celles qui ne reposent pas sur la fiction des modèles, mais sur la condition humaine et cosmique ?
I. Déconstruction : les marchés comme artefacts humains.
1. Une naturalisation idéologique :
L’économie néoclassique a bâti son prestige en s’imaginant physique sociale. Elle a parlé de « lois » — loi de l’offre et de la demande, loi de la concurrence — comme si elles étaient gravées dans le marbre de la nature. Mais ces « lois » ne sont que modèles, abstractions fragiles, qui s’effondrent dès qu’on regarde le réel : crises, bulles, monopoles, inégalités.
2. Les conventions comme fondements véritables :
Les marchés ne tiennent que parce que des hommes croient à la monnaie, respectent les contrats, acceptent les règles du jeu. Ils reposent sur des conventions partagées, toujours révisables, toujours contestées. Loin de la nature, ils sont fruits de l’histoire et de la culture.
3. Les rapports de force masqués :
Ce qui se donne comme « équilibre naturel » n’est souvent que la cristallisation d’un rapport de pouvoir : qui a le droit d’émettre la monnaie, qui impose ses normes commerciales, qui fixe les règles de propriété. Le marché, loin d’être neutre, est une construction politique.
Ainsi, il faut le dire avec clarté : non, les marchés ne reposent pas sur des lois naturelles.
II. Reconstruction : les véritables lois naturelles de l’économie :
Si les marchés ne sont pas naturels, l’économie n’est pas pour autant hors-nature. Elle est traversée par des lois profondes, enracinées dans la condition humaine et dans la structure du vivant.
1. La loi de l’interdépendance :
Nul ne vit seul. L’homme dépend des autres, de la terre, du soleil, de l’air, des forêts, des océans. Toute économie est d’abord une organisation de cette interdépendance. Croire à l’autosuffisance des marchés, c’est oublier que nous ne sommes jamais que maillons d’un réseau vital.
2. La loi de l’abondance potentielle :
La nature n’est pas un coffre clos, mais un champ de potentialités. Les ressources se transforment, se renouvellent, se recyclent. L’énergie du soleil, du vent, des océans, et les capacités infinies de la connaissance humaine, montrent que l’économie n’est pas prisonnière de la rareté mais ouverte à l’abondance.
La véritable limite n’est pas la matière, mais l’imagination collective et l’organisation sociale. Là où les systèmes privilégient l’accumulation privée et le gaspillage, la rareté domine. Là où les nations s’ouvrent à la coopération et à la création, l’abondance surgit.
3. La loi de la réciprocité :
Avant le marché, il y eut le don. Les sociétés humaines se sont bâties sur le troc symbolique, sur l’échange de paroles, de présents, de services. La réciprocité est une loi anthropologique, plus forte et plus ancienne que le calcul égoïste. Toute économie qui l’ignore perd son ancrage humain.
4. La loi de la temporalité :
La vie bat au rythme des saisons, des cycles, des générations. Les économies, elles aussi, connaissent des phases d’expansion et de crise, des régimes qui naissent et s’épuisent. Le Natiomètre révèle cette cyclicité profonde : 128 ans comme pulsation de l’histoire des nations. L’économie ne peut être pensée que comme temporalité rythmée, jamais comme mécanisme statique.
5. La loi de la justice :
Enfin, il est une loi propre à l’homme : nul corps social ne survit à l’injustice extrême. Les sociétés trop inégalitaires se brisent, car l’injustice détruit la confiance, la solidarité, l’adhésion. La justice est donc une loi de survie, une loi naturelle de l’ordre humain.
Conclusion :
De la fiction au réel.
Les marchés n’ont jamais été naturels : ils sont tissés de conventions humaines, fragiles et révisables. Mais l’économie, comme organisation de la vie, obéit à des lois plus profondes : interdépendance, abondance potentielle, réciprocité, temporalité, justice.
En reconnaissant ces lois, la Natiométrie se dresse comme l’héritière et la refondatrice de l’économie politique. Elle rompt avec la fiction de la rareté, avec le dogme de l’équilibre spontané, pour proposer un cadre mesurable et vivant : un étalon civilisationnel.
L’économie cesse alors d’être une mécanique froide pour redevenir une science humaine, enracinée dans la vie, au service de l’émancipation des sociétés.